A Toulouse
La cheminée qui fume n'est pas celle de l'usine. C'est celle de l'incinérateur d'ordures ménagères. Les établissements Guichard et Cie ne produisent plus de textile depuis longtemps. Ils ont été 1 000 à y travailler. Ils ne sont plus que 80 magasiniers, manutentionnaires, responsables ou administratifs, avenue Larrieu sur la zone industrielle sud de Toulouse, à gérer les stocks de tee-shirts, culottes, slips, bustiers et caleçons qui arrivent de l'extérieur pour être répartis vers les grandes surfaces.
Mardi, 7 h 50, Yvette (1), «ancienne de la teinture» reconvertie aux bons de commandes, descend de son bus pour embaucher. Elle sourit de travers à l'évocation du nom de Sarkozy : «Qu'est ce qu'il en sait, lui, de la vie ouvrière ?» Elle n'a pas mieux avalé son thé au lait du matin parce que le ministre candidat cite Jaurès : «Que je sache, Jaurès n'a jamais parlé de contrôler le droit de grève.» Yvette était du mouvement en 2003 quand les ouvriers protestaient contre les fermetures. Elle hausse des épaules : «Bientôt, il va nous annoncer qu'il adhère à la CGT...» La goutte au nez, Roger peste contre ces marchandises qui arrivent «par camions entiers» des pays de l'Est : «Chirac nous a déjà fait le coup du Père Noël de la feuille de paye. Je ne vais pas me mettre à croire que Sarkozy ferait mieux contre les délocalisations.» Il se tourne vers Yvette : «Tu connaissais Michèle ? demande-t-il sans attendre de réponse. E