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Interview

«Les contrôles contribuent à provoquer les infractions»

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Sociologue des banlieues, Laurent Mucchielli revient sur plusieurs décennies de déficit de police de proximité et sur la dégradation des relations avec la population.
publié le 6 avril 2007 à 7h04

Laurent Mucchielli est sociologue sur les banlieues au CNRS. Il est l'auteur, avec Véronique Le Goaziou (et Marwan Mohammed), de Quand les banlieues brûlent (1). Selon lui, les contrôles de police sont créateurs d'un surcroît de désordre.

Les contrôles font-ils partie du quotidien pour certains quartiers ?

Absolument. Chacun connaît la formule répétée en boucle depuis quinze ans sur les «cités» devenues «zones de non-droit» où «la police n'ose plus entrer». Quand on observe la réalité, on s'aperçoit que c'est un mythe. Dans les quartiers populaires, la police est très présente. Elle y patrouille en voiture de jour comme de nuit. Souvent, les policiers procèdent à des contrôles qui peuvent déboucher sur une fouille à corps, puis éventuellement sur une interpellation et une garde à vue. Tout ça sans qu'il y ait eu d'autre infraction que celle introduite par le contrôle lui-même. Dans bien des cas, ces contrôles ne contribuent pas à découvrir des infractions, mais à les provoquer. Ce sont les fameuses Idap ­ Infractions à personne dépositaire de l'autorité publique ­ et leurs trois catégories : outrage, rébellion, violence.

Ces dernières années, les contrôles se multiplient.

Oui, parce qu'on ne donne pas d'autres façons de travailler aux policiers. La police nationale n'a jamais été une police de proximité. A la suite d'événements comme la guerre d'Algérie ou mai 68, elle s'est constituée comme une police au service de l'Etat et non au service du public. Elle ne procède pas