Dans cette campagne électorale, une chose m'a étonné : les résistances que Ségolène Royal a provoquées à gauche, jusque dans le camp même des socialistes. Combien de fois m'est-il arrivé d'entendre des sympathisants du PS confesser avec irritation que plutôt que Ségolène, son «ordre juste» ou son «drapeau tricolore», ils voteraient Bayrou ou Besancenot, ou, pour les plus réalistes, qu'ils seraient à l'extrême rigueur disposés à voter pour elle, mais en se pinçant le nez.
En Italie, nous savons ce que veut dire se pincer le nez. Et nous savons aussi que, si ce n'est pas la gauche qui parle au peuple, c'est la droite qui s'en charge, ou, pire encore, l'extrême droite.
En 1994, quand Silvio Berlusconi fait son entrée sur le terrain, nombreux sont ceux qui se moquent de son populisme et ne se rendent pas compte que, en s'adressant directement aux gens par le biais de son empire médiatique et par sa volonté d'apparaître comme un homme du peuple , il Cavaliere est en train de transformer les règles du jeu politique. Et la gauche, immobile, perdue, se fit dérober le vote populaire.
Plutôt que de faire leur autocritique et de se demander pourquoi ceux qui devraient constituer leur électorat naturel s'étaient laissé séduire par les sirènes berlusconiennes, d'aucuns parmi les progressistes avancèrent carrément l'idée que la faute était celle des Italiens, génétiquement de droite. En réalité, l'offre politique de la gauche ne répondait plus aux attentes quotidiennes de ce peuple