Avec le beau temps, Magloire Bena, 23 ans, va retrouver tous les soirs ses copains derrière sa résidence. Un banc, le seul qui reste, une étendue d'herbe, un point d'eau, la collecte pour les bouteilles de coca... s'il n'y avait pas le RER D qui passe à proximité et les avions qui décollent d'Orly, on oublierait presque qu'on est dans une banlieue de l'Essonne, à Vigneux-sur-Seine. Etudiant en mastère administration, gestion d'entreprise, Magloire voulait qu'on écoute un de ses débats avec ses potes en bas de la cité. Sur le chemin, il sermonne son petit frère, 17 ans, qu'il a vu du balcon faire le fou sur une motocross : «Qu'est ce qui t'arrive ? Tu t'es pris pour un bonhomme ? Je veux plus te voir là-dessus.»
Cinq de ses amis sont déjà sur le banc, une vraie pub pour la France black-blanc-beur : deux Noirs, deux Blancs, un Arabe. Bilal a suivi Magloire dans les études, il est en licence. J.-F. cherche du travail, «mais pas vraiment», Cédric est entre deux jobs de vendeur de prêt-à-porter, Stéphane travaille pour une association de protection de la nature. Lui était presque sûr de voter Verts au premier tour, mais les débats télévisés et le climat actuel l'ont fait changer d'avis : «En plus, je trouve les Verts vraiment limite sur la politique nationale et internationale», ajoute-t-il.
Cédric, qui fait genre de ne pas toucher à la politique mais qui achète Libé quand Olivier Besancenot est en une, se résout à voter Ségolène Royal au premier tour :