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Libération
Interview

«DSK ou Fabius auraient pu gagner»

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publié le 10 mai 2007 à 7h41

Emmanuel Todd est démographe. Il a publié, entre autres, Après l'Empire (1). Il décortique les ressorts contradictoires du vote Sarkozy : revendication égalitaire et aspiration libérale.

Vous aviez décrit Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal comme les «candidats du vide». Le taux de participation modifie-t-il votre jugement ?

Cette élection est un grand succès pour le système politico-médiatique, qui a réussi à mobiliser massivement la population en évitant de traiter les problèmes qui intéressent les gens : délocalisations, déflation salariale, inégalités de revenus et de conditions de vie. Pendant la campagne électorale, les deux candidats, Nicolas Sarkozy sur un mode majeur et Ségolène Royal sur un mode mineur, ont collaboré au remplacement d'un débat économique réaliste par un débat sur l'identité nationale. Au soir du second tour, leur satisfaction parallèle évoquait une certaine complicité systémique.

Comment la relégation de la question économique a-t-elle été rendue possible ?

Pour moi, la vraie surprise fut celle du premier tour. Je n'avais nullement anticipé ­ et c'est un euphémisme ­ que Nicolas Sarkozy serait capable d'attirer une partie de l'électorat du FN. Je ne voyais pas comment ses thématiques inégalitaires, son côté dur aux faibles, communautariste, proaméricain, pourraient séduire une France dont les valeurs sont plutôt opposées. C'était sous-estimer l'impact de la crise des banlieues, dont le souvenir a été opportunément ravivé par les incidents d