Paru le 4 avril 2000
La dernière fois, nous l'avons vu captif. Egaré tout à droite d'un box, réduit à presque rien par la gravité d'une cour d'assises. C'était le 12 novembre 1995. Debout, les mains serrées sur la rambarde en geste prisonnier, il laisse échapper un souffle coupé. «Dix ans de réclusion criminelle», vient de dire le juge. Deux ans auparavant, il était assassin. C'était le 8 juin 1993. Conférence de presse précipitée dans la petite chambre à fleurs d'un hôtel, aux portes de Paris. Assis sur le lit, debout, partout à la fois, jetant ses bras en l'air, actionnant à bout de doigt une détente invisible, il refait pour quelques-uns le geste de tuer. Dans son sac de sport, un revolver. Et il parle, fébrile, le visage épuisé de tics, la pensée en désordre. Il parle les yeux clos, tremblant du corps, prétend avoir «écrasé un serpent»,«une bête malfaisante», bouscule furieusement les phrases éparpillées, dit Dieu, les juifs, les poètes. Avant que le mot «police» ne le terrasse. Il vient d'assassiner René Bousquet, ancien secrétaire général de la police de Vichy. C'était il y a sept ans.
Ce matin, Christian Didier, 56 ans, regarde ses mains nouées, et aussi le ciel de pluie par la fenêtre sans barreaux. Il a été assassin, puis captif. Libéré pour bonne conduite le 24 février dernier et rentré chez sa mère à Saint-Dié-des-Vosges, il est redevenu simplement malheureux. «Je croyais qu'en tuant Bousquet, je tuerais le mal qui est en moi. Mais il