Grévistes contre «usagers pris en otages», «corporatismes» contre «intérêt général», «privilégiés» contre «travailleurs méritants». Etudiants et enseignants à l'université, directement confrontés aux conséquences de la loi relative aux libertés et responsabilités des universités (LRU), nous sommes convaincus de la nécessité de transformer l'université.
En tant que chercheurs en sciences sociales, nous estimons que cette présentation politico-médiatique des mouvements sociaux actuels masque la question centrale qu'ils nous posent : celle de la place des services publics dans notre société. Déjà présentes en 1995, ces préoccupations n'ont pas trouvé de réponse politique. L'invocation rituelle de la «modernisation», de l'«autonomie», de la «gouvernance», et les mesures apparemment techniques qui sont menées au nom de ces mots d'ordre empêchent le nécessaire débat sur la finalité des réformes en cours. Loin d'être une nouvelle poussée de l'éternelle rébellion de la jeunesse, la mobilisation des étudiants a ceci d'original qu'il s'agit d'un mouvement porté par les usagers du service public eux-mêmes. Par leurs revendications, les étudiants mettent le doigt sur les ambiguïtés de l'autonomie ainsi proclamée par la loi. Sera-t-elle plus autonome cette université qui devra compter sur les fonds privés plutôt que le financement par l'impôt, garant de la solidarité nationale ? Seront-ils plus autonomes ces étudiants qui devront bientôt s'acquitter de droits d'inscription plus élevés ? S