Sur la table du bistrot, l'Homme compassionnel de Myriam Revault d'Allonnes, matière pour sa prochaine chronique. «Epoque»paraît le samedi, page 2, depuis 2006. De la compassion, il en faut un peu pour Jean-Michel Dumay, qui n'a pas dormi plus de quatre heures par nuit pendant deux mois. Chemise bleu tendre assortie à ses yeux, il a posé ses lunettes sur le livre et se sert un thé avec des gestes urbains.
La veille, le président de la Société des rédacteurs du Monde (SRM) a démissionné. Sa bête noire, Alain Minc, a lui aussi rendu son tablier. Les actionnaires externes n'auraient pas élu Eric Fottorino si Dumay ne s'était pas engagé à plier bagage. L'offrande sacrificielle sur l'autel de l'apaisement. Dumay, la voix des journalistes, le héraut de l'indépendance dressé contre l'appétit capitaliste, a été forcé de partir par les patrons. Bien secoué, l'homme n'est pourtant pas à terre. Toujours au Monde, toujours éminence grise de la SRM. Et toujours ruminant.
Pourquoi ce «Torquemada», dixit Minc, cristallise-t-il autant les passions ? Voix grave au timbre égal, le sourire rare, il frissonne à peine aux boutades. Jean-Michel Dumay paraît aussi sérieux que s'il était resté l'«indécrottable» premier de la classe. Le faire parler d'autre chose que de son Monde serait presque passer soi-même pour un Torquemada. «Ah, vous voulez vraiment que je parle intime ?» semblent s'offusquer ses sourcils broussailleux. C'es