Lynn Higgins a fondé, il y a presque trente ans, en 1979, les «Women Studies», département d’études sur les femmes, à la prestigieuse université de Dartmouth dans le New Hampshire. Figure du monde américain académique et du débat intellectuel, elle a développé, entre autres, des séminaires de recherche sur la théorie féministe. Elle enseigne toujours à Dartmouth.
Vous avez toutes milité pour Hillary Clinton, qui a perdu la bataille contre Barack Obama. Que s’est-il passé ensuite chez les féministes ?
Avec Hillary, on avait la chance d'avoir une candidate qui représentait les aspirations du féminisme et qui était une personne compétente, une professionnelle incontestable de la politique. Même si certaines d'entre nous disaient que le fait qu'elle soit mariée à Bill était un problème, qu'elle n'était pas une femme totalement indépendante, qu'en fait on votait pour un team. Hillary faisait peur aux Américains. Pas seulement parce qu'elle est féministe, mais parce qu'on se méfie des gens qui pensent. Hillary était accusée d'être intelligente. Bush, par exemple, a fait un gros effort pour ne pas s'exprimer comme un type qui a fait des études. L'anti-intellectualisme est très fort. On ne cesse de dénoncer les «élites intellectuelles». En revanche, les gens n'ont pas peur de Sarah Palin, ils ont envie d'aller boire une bière avec elle. Et les hommes l'adorent, ils la trouvent sexy. Palin est sortie de nulle part, on n'avait jamais entendu parler d'elle, même dans le Parti républicain. C'est seulement un coup cynique pour préempter le vote des femmes qui, par féminisme, ont soutenu Hillary. Gloria Steinem, l'icô