Oublions les people et les grandes fortunes, les amis de Liliane Bettencourt et consorts, ceux qui ont pris le risque d’investir chez Madoff en direct et aux Etats-Unis, et concentrons-nous sur les anonymes, les épargnants moins richement dotés, ceux qui ignoraient jusqu’au nom de Madoff. Certains ont même souri, le matin du 12 décembre, en découvrant aux infos, qu’un escroc prénommé Bernie avait roulé dans la farine le gotha international. Eux avaient investi dans des placements qu’ils croyaient pépères ou dans des fonds tamponnés UBS, la rolls des banques, et suisse par-dessus le marché. Ces fonds, baptisés Luxalpha ou Luxinvest, avaient reçu un second viatique, le tampon du CSSF (Comité de surveillance du secteur financier), le régulateur de la finance au Luxembourg. Et pourtant… Dix semaines après l’éclatement du scandale, ces victimes sont toujours sur le carreau. Et le Luxembourg est sur la sellette.
Paul S. fait partie du lot. Comme ses camarades épargnants floués par Madoff, il tient à son anonymat. Dans une brasserie près de Beaubourg à Paris, Paul, la cinquantaine discrète, est venu avec son dossier. Atteint d'une maladie chronique, il a pris la précaution, très tôt, d'alimenter une assurance-vie. Sa vie professionnelle, hachée - il travaille dans le secteur du film d'auteurs -, ne lui a pas permis de cotiser avec régularité. D'où sa ténacité pour rechercher les coupables. Son histoire est représentative de milliers d'autres qu'on est incapable, aujourd'hui, de chif