C’est à Dominique Villepin, alors Premier ministre de Chirac, qu’on doit le premier bouclier fiscal. Voté fin 2005, il est appliqué à la déclaration de revenus (et de fortune) de l’année 2006. L’argumentaire avancé alors ne fait pas dans la nuance : éviter la confiscation des (hauts) revenus par des impositions stratosphériques. Le contribuable sur lequel on fait pleurer est l’agriculteur de l’île de Ré, dont les hectares - pression touristique oblige - valent le prix d’un duplex à Neuilly, mais dont les revenus côtoient le Smic.
Le mécanisme du bouclier est le suivant : un contribuable ne peut libeller au trésor public, au titre de ses impôts, un chèque supérieur à 60 % de son revenu courant. Au moment du vote, le gouvernement chiffre les bénéficiaires à 93 000 contribuables (dont 16 000 redevables à l’ISF, l’impôt de solidarité sur la fortune) et la facture pour l’Etat - en manque à gagner fiscal -, à 400 millions d’euros. Le calcul est tout faux. 16 000 contribuables seulement vont réclamer (dont 3 700 imposés à l’ISF) le bénéfice du bouclier.
L'année suivante, le candidat Sarkozy remet une couche au dispositif. Il évoque la confiscation indue des fruits du travail et déplore ces milliers d'exilés fiscaux qui fuient l'ISF. Elu, il fait voter la loi Tepa (Travail, emploi, pouvoir d'achat), qui contient le bouclier version 2 : son taux «descend» à 50 %, mais il inclut la CSG. D'où une puissance décuplée. L'opposition se déchaîne sur ce «cadeau fiscal» , qu'elle chiffre entre