Je n’ai jamais compris pourquoi il faudrait à tout prix opposer l’Europe dite intergouvernementale à une Europe dite communautaire. Ou, pour être plus clair, une Europe technocratique à une Europe politique. Une présidence forte et stable du Conseil n’est pas en soi contradictoire avec une Commission imaginative, réactive et politique. Ce sont des schémas par trop manichéens, qui reposent sur une lecture caricaturale et surannée du fonctionnement des institutions communautaires. D’abord, n’oublions jamais que l’Europe reste une alchimie entre les hommes et les femmes qui la font vivre et les institutions. Même avec les meilleurs aux commandes des manettes européennes, il ne peut rien se passer sans un cadre institutionnel adéquat. Et l’inverse est vrai aussi. Rien ne peut se construire dans la durée sans le cadre institutionnel approprié. Et aucune institution ne peut être politique, aucun projet ne peut prendre corps sans incarnation. C’est vrai de la Commission avec Jacques Delors, du Parlement avec Simone Veil, du Conseil avec Nicolas Sarkozy.
Ensuite, lorsque l’Europe doit affronter des crises particulièrement sévères, les équilibres interinstitutionnels s’ajustent, sous la pression des événements. Les tempéraments individuels s’affirment. Entrent en jeu, aussi, la stabilité politique du pays qui exerce la présidence, le poids de son administration, une certaine familiarité avec les questions européennes qui ne s’acquiert pas instantanément.
Pendant la présidence française