Bien entendu, il était naturel de commencer par évaluer les mouvements vigoureux qui se sont produits à l’occasion des élections européennes, aussi bien à l’échelle nationale qu’à l’échelle de l’Union : vague conservatrice et reflux social-démocrate dans vingt Etats sur vingt-sept, stagnation de l’extrême gauche et des souverainistes (sauf, pour ces derniers, dans quelques petits Etats craignant pour leur identité) et, en France, prouesse d’Europe Ecologie et déroute du Modem.
Cela posé, restent les deux chiffres les plus spectaculaires et les plus embarrassants : 57 % d’abstention pour l’ensemble des Vingt-Sept, 59 % en France. Il s’agit bel et bien d’une interpellation qui s’adresse directement aux institutions européennes. Ce n’est pas le sentiment européen qui est en cause, vingt sondages l’attestent, c’est l’incompréhension, l’indifférence, l’éloignement d’une nette majorité de citoyens à l’égard des institutions européennes. Il n’y a pas de rejet de l’Europe, au contraire, mais il y a rejet de ses institutions. Le paradoxe veut que cela se manifeste à propos de la plus démocratique des institutions européennes, le Parlement de Strasbourg. La seule assemblée plurinationale élue au suffrage universel direct, la première et la seule au monde dans ce cas, symbolise manifestement une Europe trop technocratique et trop opaque. L’abstention massive est en réalité un vote sanction contre l’ésotérisme des institutions européennes.
Comment d’ailleurs donner tort aux citoyens désen