Martine Aubry n’avait pas le choix : le PS titubait, les quadragénaires frondaient, les ténors l’ignoraient, son autorité vacillait. Il fallait donc briser la banquise. Elle l’a fait par la seule méthode disponible en déclenchant ce qu’elle ne pouvait pas empêcher, c’est-à-dire en programmant solennellement ces primaires ouvertes que jusqu’alors elle retardait ou repoussait. La formule n’a d’ailleurs rien d’incongru, bien au contraire. Le système actuel est tragique. Il déclenche d’infernales querelles moliéresques entre les prétendants, il se prête à toutes les manipulations, les conjurations, voire les fraudes. Il stérilise la réflexion, il bloque le renouvellement des candidats, il entretient les archaïsmes. Le PS est profondément conservateur, aussi bien intellectuellement qu’organiquement. Il est devenu un parti d’élus et de militants territoriaux, certes le premier de France mais à l’échelon local. La droite a le monopole du pouvoir national, la gauche gère les territoires. Le mode de désignation de ses candidats n’y est pas pour rien : le PS est devenu un parti sénatorial.
Tout l’intérêt des primaires ouvertes est de faire exploser ce système. A partir du moment où le pouvoir de désignation du candidat à l’élection présidentielle passe des notables et des militants aux sympathisants et aux électeurs, tout change. Le camaïeu de fiefs, de baronnies et de châtellenies s’efface sur le champ. Le rideau s’ouvre sur deux, trois ou quatre millions d’électeurs et tout devient d