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TRIBUNE

Hissène Habré sera-t-il jugé un jour ?

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par Jacqueline Moudeïna, présidente de l’Association tchadienne des droits de l’homme et avocate des victimes de Hissène Habr
publié le 5 novembre 2009 à 0h00

Pourquoi le Sénégal tarde-t-il à juger l’ancien dictateur tchadien Hissène Habré, exilé à Dakar depuis sa chute en 1990 et accusé de crimes contre l’humanité, crimes de guerre et actes de torture ? En 2006, le comité contre la torture des Nations unies a condamné le Sénégal pour violation de la Convention contre la torture et lui a demandé de juger Habré ou de l’extrader. Depuis, aucune instruction judiciaire n’a été ouverte. Quand Habré est renversé par Idriss Déby en 1990, il prend ses dispositions pour s’assurer une protection sur sa terre d’exil : il emporte la caisse du Trésor public. En peu de temps, Hissène Habré s’est attaché de puissants soutiens au Sénégal, notamment auprès du khalife de la confrérie tidjane, très influente dans la politique sénégalaise.

L'affaire avait pourtant bien commencé. En janvier 2000, les victimes tchadiennes déposent plainte contre leur bourreau à Dakar ; le mois suivant, Habré est inculpé par un juge sénégalais. Peu après, Abdoulaye Wade est élu président du Sénégal et l'avocat de Habré, Madické Niang, qui était en même temps conseiller juridique du président Wade, introduit une requête en annulation, soutenu par le parquet. Le président Wade a annoncé que Habré ne sera pas jugé au Sénégal et les juridictions sénégalaises se déclarent incompétentes, foulant au pied la Convention contre la torture. Un revers qui ne décourage pas les victimes. En 2001, Wade déclare : «Si un pays, capable d'organiser un procès équitable - on parle de la