La mort inopinée de Philippe Séguina déclenché une avalanche d’hommages dithyrambiques et de condoléances théâtrales qui sonnaient parfois comme des repentirs posthumes. Si la douleur de François Fillon ou le chagrin d’Henri Guaino n’avait rien de factice, si la tristesse de Nicolas Sarkozy n’était pas feinte, nombre de ceux qui célébraient soudain le défunt avec une emphase pompeuse disaient d’autant plus de bien du disparu qu’ils en avaient dit du mal de son vivant. La cérémonie des Invalides avait la solennité méticuleuse et le cérémonial militaire qu’aurait souhaité le premier président de la Cour des comptes mais bien des figurants y jouaient des rôles de composition.
Philippe Séguin n’a jamais été un homme de consensus et a toujours eu beaucoup plus d’adversaires que d’alliés. S’il avait certainement le cœur plus tendre qu’il n’y paraissait, ses colères étaient terribles, ses bons mots étaient assassins et l’on ne compte plus ceux qu’il avait blessés ou meurtris, y compris parmi ses proches. Son éloquence presque unique - seul François Mitterrand lui était supérieur - tournait irrésistiblement au réquisitoire sans merci. Ses sautes d’humeur étaient célèbres et lorsqu’un courroux jupitérien l’embrasait, malheur à ceux qui lui servaient de cible.
Les victimes lui rendaient la pareille plus sournoisement, plus obliquement, plus durablement. Pour dire les choses comme elles étaient et non pas comme on les travestit désormais, son caractère shakespearien a gâché des dons écla