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Libération
Interview

«On ne peut prendre ces mesures au sérieux»

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Gérard Noiriel, historien, explique combien les annonces de François Fillon sont archaïques :
publié le 9 février 2010 à 0h00

Gérard Noiriel est historien. Spécialiste de l'immigration, il a notamment écrit A quoi sert l'identité nationale (éd. Agone) en 2007.

Que pensez-vous du débat lancé par le gouvernement sur l’identité nationale ?

J’ai pris pour principe de ne pas l’alimenter, j’ai décliné les invitations à participer au débat comme celle que m’avait faite Hervé Morin. Depuis l’affaire Dreyfus, l’identité nationale n’a cessé d’être utilisée par le politique : on l’appelait «l’âme nationale», «le caractère national», «la personnalité nationale»… L’histoire montre qu’à chaque fois, la mainmise des politiques se fait dans un contexte d’exclusion de l’étranger. Après la Seconde Guerre mondiale, plus personne n’osait réactiver ce thème identitaire, en souvenir de la révolution nationale de Vichy, jusqu’à ce que le FN prouve qu’il avait une portée électorale. Dès lors, la droite n’a cessé de vouloir le récupérer: souvenez-vous de Jacques Chirac et de sa refonte du code de la nationalité. En 1986, on suspectait les jeunes d’origine étrangère de ne pas être loyaux envers la France : bien plus violent qu’aujourd’hui. C’est une leçon intéressante du débat actuel : la société française a évolué.

Cette fois, le débat a-t-il été un échec ?

Par rapport aux objectifs que le gouvernement s’était fixé, oui. En vingt ans, la société s’est internationalisée : il n’y a guère plus que la politique qui se joue dans le cadre national. Beaucoup de Français sont liés dans leur famille à des personnes d’origine étrangère. Beaucoup sont engagés par certains aspects de leur existence dans des réseaux internationaux. Regardez la mus