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Libération
Éditorial

Vulgarité

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publié le 22 février 2010 à 0h00

Pour exprimer le peuple, faut-il mal parler ? Pour rallier le vulgus (foule en latin), faut-il être vulgaire? Dans son opuscule en défense, Georges Frêche se présente comme l'innocente victime du politiquement correct, comme le bouc émissaire de la bien-pensance langagière, comme une sorte de Dreyfus de la langue, condamné à tort par le parisianisme. A l'entendre, il incarne la verve méridionale face à la langue de bois qu'on pratiquerait surtout au nord du pays. Mais depuis quand cette exubérance de style, qui fait le charme de certains orateurs, impliquerait-elle la brutalité méprisante, la dénonciation sommaire de l'adversaire et l'usage systématique et louche de catégories ethniques ? La faconde du midi se trouve chez Pagnol. On y cherche vainement la vulgarité. Certes, dans les actes, Georges Frêche n'est pas raciste ou antisémite. Mais ses propos répétés et assumés, comment les qualifier ? Georges Frèche n'est pas Mussolini. Plutôt Berlusconi par le style. Mais en posant sur sa douteuse logorrhée une étiquette populaire, il ne défend pas le peuple. Il le rabaisse.

Il aime à se rattacher aux grands du socialisme. Aucun d’entre eux, pas plus Blum que Mitterrand, n’a sacrifié la qualité de la langue à une soi-disant efficacité électorale. Au contraire, ils mettaient un point d’honneur à parler aux ouvriers avec la même exigence qu’aux intellectuels. Frêche se réclame de la social-démocratie. Il n’est que l’avatar un peu lamentable du social-féodalisme. Et Martine