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Portrait

Pierre Joxe, force de loi

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Conseil constitutionnel (1/2). Cette figure d’une gauche rigoureuse quitte les Sages en plaidant pour l’expression des «opinions différentes».
Pierre Joxe , le 10 janvier (Photo Philippe Wojazer. Reuters)
publié le 11 mars 2010 à 0h00

A ceux que l’implacable décompte des ans obsède, un conseil : jetez un œil sur Pierre Joxe. A 75 ans, silhouette de jeune homme, l’ex-fidèle de François Mitterrand entame une nouvelle carrière professionnelle auprès de sa nouvelle femme, et son regard n’a jamais autant pétillé. En ce samedi pluvieux d’hiver, il nous reçoit chez lui, dans son incroyable demeure familiale du quai de l’Horloge, sans paraître nous en vouloir d’être arrivée en avance (8 h 15) et de l’avoir tiré du lit (ce qui nous rassure, car l’homme est capable de terribles colères froides). Seule sa tignasse poivre et sel ébouriffée témoigne de l’heure matinale. Il s’assoit devant son ordinateur, chemise finement rayée au col entrouvert, et s’enquiert de sa grosse voix traînante. «Vous parlez allemand ?» Devant notre moue mortifiée, il sourit. «Ce n’est pas grave. Je traduis un texte et je bute sur un mot, je me disais que vous pourriez m’aider.»Pierre Joxe quitte, cette semaine, le Conseil constitutionnel et il fourmille d’activités et de projets. Comme libéré.

Si libéré qu'il n'a pas attendu la fin de son mandat pour publier un livre qui rompt avec la règle d'or du Conseil qui exige que les Sages ne dévoilent jamais leurs «opinions différentes». Il a trop souffert de devoir ravaler ses désaccords. Avant de tirer sa révérence, il s'est donc fixé une mission : convaincre les sages de se moderniser. Officiellement, il s'est heurté à la majorité de ses pairs sur trois cas : la garde à vue des