Ce matin, peu après 9 h 30, Michel Charasse jurera sur les saintes écritures et deviendra prêtre. Non, pardon ! Il prêtera serment devant le président de la République et sera promu gardien de la Constitution. Car la République, l'a-t-il assez répété, est sa seule religion. Au milieu des années 90, lorsqu'une première fois fut évoquée la possible nomination de Charasse au Conseil constitutionnel, l'éditorialiste Philippe Alexandre déboula au micro de RTL avec une bonbonne de vitriol : quoi, s'étrangla-t-il, on va laisser ce «bouffon attitré» de François Mitterrand «enlever au Conseil la respectabilité et le peu de prestige qui lui restent encore» ? Charasse fit condamner Alexandre pour diffamation. Depuis, la Terre a tourné, et cette fois nul n'a entonné l'air de la bouffonnerie. Non par crainte de procès, quoique Charasse ait l'assignation facile, mais parce que le natif de Chamalières (Puy-de-Dôme) commence à avoir la gueule de l'emploi. «Mozart du droit», «fin connaisseur de la chose constitutionnelle», ont apprécié les éditorialistes du XXIe siècle. On ne parle plus d'imposture, mais de compromission. Car n'est-ce pas grâce à Sarkozy que l'«électron libre de la Mitterrandie» est parvenu au stade ultime de son ambition ?
L'intéressé, emplissant une dernière fois son petit bureau au Sénat des volutes écœurantes d'un barreau de chaise, répond en souriant que Nicolas Sarkozy est «un ami», fréquenté dans les années 90 à l'Elysée,