Au-delà des manifestations syndicales et du bras de fer politique, la vraie bataille des retraites est celle de l’opinion. Les Français sont-ils prêts à défendre bec et ongles l’acquis social de 1983 qu’est la liberté de prendre sa retraite à partir de 60 ans ? Ou, après un baroud d’honneur, vont-ils tourner la page ?
Les sondages qui se sont succédé ces dernières semaines montrent qu'ils sont un peu schizophrènes : ils peuvent à la fois proclamer massivement leur attachement à la retraite à 60 ans (63% dans le sondage Viavoice pour Libération les 6 et 7 mai auprès de 1012 personnes), et admettre qu'une réforme est nécessaire et un recul de l'âge de départ inéluctable.
«Fatalisme». François Miquet-Marty, directeur de Viavoice, fait le constat de cette «ambivalence». «Majoritairement, explique-t-il, les Français disent leur attachement à la retraite à 60 ans, et ils font preuve de fatalisme. Ils se sentent solidaires des gens qui manifestent, mais ils ne vont pas pour autant manifester.» Deux sondages publiés hier par Le Parisien et l'Humanité montrent quand même que près des deux tiers d'entre eux (trois quarts des sympathisants de gauche) se disent prêts à descendre dans la rue pour défendre le droit de partir à 60 ans.
«Les gens font de la question des 60 ans un enjeu symbolique lourd, estime le politologue Stéphane Rozès, président de Cap (Conseils Analyses et Perspectives), et ils ne sont pas prêts à