A un moment où les crises sont sociales, économiques, écologiques et démocratiques, les potentialités critiques sont immenses. Combien d’acteurs syndicaux ou associatifs se mobilisent contre les reculs des droits et libertés mais enragent de ne pouvoir adosser leur action sur une dynamique politique conséquente ? Le paradoxe est là : alors que la légitimité du capitalisme est en berne, les forces qui la contestent n’arrivent pas à faire émerger une alternative politique tangible, crédible, audible.
Si les résistances ne manquent pas, leur convergence reste à construire. Pour cela, la gauche de transformation sociale et écologique doit à la fois se recomposer et innover. Sortir du concours de nains politiques pour se donner les moyens de gagner et de changer les conditions de vie du plus grand nombre n’est pas une tâche facile. Des «comités Juquin» aux collectifs antilibéraux, en passant par la CAP ou «l’appel Ramulaud», on ne compte plus les rendez-vous manqués… Qu’est-ce qui, fondamentalement, a toujours rendu impossible depuis vingt ans le rassemblement de l’autre gauche ?
Mon hypothèse, c’est que nous ne croyons pas vraiment en nous-mêmes. Nous ne prenons pas au sérieux notre capacité à être majoritaire et à peser sur le cours des choses. C’est la peur de gagner, la peur des victoires qui nous mettraient devant des responsabilités nouvelles. La pureté du discours, fut-elle au prix de la solitude et de la marginalité, importe alors plus que la mise en commun de nos forces. I