La gauche peut-elle éviter le populisme ? Je retournerais volontiers le point de départ de la question : pourquoi la défiance populaire à l’égard de la gauche reste-t-elle si élevée, alors même que le rejet du pouvoir sarkozyste et la critique du système capitaliste s’affirment l’un et l’autre. Pourquoi ce décalage ? Pourquoi cette incapacité à porter la colère populaire grandissante ?
Un chiffre : les groupes du CAC 40 annoncent un record de distribution de dividendes aux actionnaires de 43 milliards d’euros en 2010 ! Qui peut accepter une telle aberration quand tant de gens souffrent de la crise et quand les cadeaux fiscaux aux capitaux et aux banques creusent les déficits publics ? C’est ce fossé béant entre les urgences populaires et la poursuite des folles logiques de profit qui creuse le lit du populisme. Car la crise du système est globale : ce n’est pas seulement une crise financière, mais une crise sociale, écologique, démocratique, morale, une crise du sens même de la société et du travail. Pour des millions de gens qui souffrent, c’est l’incompréhension devant des inégalités et des enrichissements intolérables. Faute d’explications, de solutions, le populisme qui est aujourd’hui au cœur du projet politique de la droite en France mais aussi dans nombre de pays européens, occupe le terrain en désignant des boucs émissaires, en inventant des ennemis extérieurs. Il retourne la peur massive du déclassement social, en divisant les classes populaires pour permettre d’une