«J'avais jamais entendu le mot, au moins il m'a appris un truc», plaisante Katia, 22 ans et courneuvienne de naissance. C'est dans cette ville de Seine-Saint-Denis, connue pour ses tours et ses faits divers liés au trafic de drogue, que Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur avait déclaré en juin 2005 vouloir nettoyer la cité des 4 000 «au Kärcher». Cette formule choc, prononcée au lendemain de la mort d'un garçonnet tué par une balle perdue, est devenue le symbole d'un discours volontariste et brutal sur la banlieue. Six ans plus tard, la pilule a toujours du mal à passer et la seule évocation de la marque allemande ou du nom du Président provoque le rejet. «J'ai rien à dire. Vous [les journalistes] êtes venus cent fois, on a parlé et ça a changé quoi ? On est dans la même merde», balance virilement un homme adossé à un mur, face à la gare RER. «Sarko qui ? Connais pas», répond sans s'arrêter mais en souriant une jeune femme voilée.
Quand les gens acceptent de s'exprimer, c'est souvent avec colère : «Il nous a insultés. Le "Kärcher", c'était une déclaration de guerre. Il nous prend pour des déchets», grogne un trentenaire, attablé avec des amis à la terrasse d'un fast-food. «Ne me parle même pas de lui, c'est un guignol. Je vote jamais, mais en 2007, j'ai voté contre lui et je ferai pareil en 2012. J'en veux même pas en ministre de l'Agriculture», complète un de ses acolytes. Dans cette ville communiste, Ségolène