C'est un peu comme leur premier pas sur la Lune à eux : les dirigeants de gauche se souviennent très exactement de ce qu'ils faisaient à l'instant où ils ont appris que François Mitterrand venait d'être élu président, le 10 mai 1981. Aux Bouffes du Nord, à Paris, hier, Robert Badinter, pour qui la victoire de la gauche signifiait l'abolition de la peine de mort, a raconté qu'il épluchait des pommes de terre avec Régis Debray dans sa cuisine en attendant les nouvelles. Signe de la fébrilité du futur garde des Sceaux ou simple agilité du philosophe, Debray «en pelait trois quand moi j'en pelais une».«C'était des pommes», a corrigé l'intéressé.
Dans sa cité minière de Lorraine, Aurélie Filippetti avait sept ans. «C'était l'âge de raison : je ne doutais pas de la victoire. Ma surprise, c'était que les adultes, eux, doutaient», a confié la jeune députée qui voudrait, dans un an, entendre à nouveau «les klaxons et la liesse». Laurent Fabius, qui avait été mis dans la confidence par un «interlocuteur au téléphone» dès 18 h 30, a confessé un «moment de prostration» après avoir entendu son premier «on a gagné». Martine Aubry avait réuni «30 copains» chez elle dans le XIVe arrondissement de Paris. «On attendait de savoir, et puis les fenêtres se sont ouvertes et on entendait les gens qui hurlaient de joie», a rapporté la première secrétaire. Le communiste Pierre Laurent, étudiant à l'époque, a célébré l'él