Conflit de pouvoirs, au sommet de l'Etat. Vendredi, la Cour de cassation a examiné un double recours, diligenté par Me Jean-Yves Le Borgne, en tant qu'avocat d'un ancien directeur de cabinet de Jacques Chirac, mais aussi d'un homme d'affaires en relation avec Nicolas Sarkozy, visant à revisiter le traitement des abus de biens sociaux. Un délit fourre-tout, au cœur des principales affaires politico-financières des vingt dernières années. Qui donc, du pouvoir judiciaire (via la Cour de cassation, statutairement indépendante) ou du pouvoir politique (via le Conseil constitutionnel, ses membres étant nommés par l'exécutif et le Parlement) va trancher ?
Glissement. L'initiative de Me Le Borgne a la forme d'une question prioritaire de constitutionnalité - QPC, qui permet à tout citoyen de contester la validité d'une loi. C'est cette QPC qui a bloqué le procès Chirac dans l'affaire des emplois fictifs de la Ville de Paris, au deuxième jour d'audience, début mars. Son objet: en matière d'ABS, la loi dit que les délits financiers sont prescrits au bout de trois ans. La Cour de cassation proclame depuis Napoléon que, s'agissant d'un délit dissimulé ou occulte, la prescription démarre non pas à l'instant où il est commis, mais au moment où il est découvert. La QPC demande au Conseil constitutionnel de censurer cette jurisprudence. Et donc de s'ériger en censeur de la plus haute autorité judiciaire, au nom de proches de Chirac et Sarkozy…
Les magistr