Professeure de sociologie à l’UCLA, Abigail Saguy travaille depuis longtemps sur le harcèlement sexuel. Aux Etats-Unis, mais aussi en France où elle a soutenu sa thèse à l’EHESS sous la direction de Serge Moscovici. Elle pointe les différences entre les deux pays.
Peut-on comparer le harcèlement sexuel aux Etats-Unis et en France ?
Aux Etats-Unis, le harcèlement sexuel est défini légalement comme un type de discrimination sexiste, en vertu du Civil Rights Act de 1964 qui rend illégal pour un employeur de discriminer en raison de la race, de la couleur, de la religion, de l'origine nationale ou du sexe. C'est l'employeur qui peut être poursuivi au civil si un(e) employé(e) se fait harceler au travail. C'est donc une infraction civile pour laquelle l'employeur, qui n'est souvent pas le harceleur lui-même, peut être condamné à des compensatory damages et à des punitive damages calculés de façon à produire un réel impact économique. En France, le harcèlement sexuel est un délit. Le harceleur peut devoir payer une amende à l'Etat et/ou des petites sommes à la victime, dans le cas où elle se porte partie civile. Techniquement, on peut aller en prison pour harcèlement, mais à ma connaissance, personne n'y a jamais été condamné pour seul harcèlement. L'employeur n'est pas concerné, il n'y a aucune forme de mesure économique visant à empêcher le harcèlement sexuel au sein de l'entreprise.
Et au plan social et médiatique ?
Au moment de l'affaire Thomas contre Hill, [en 1991], il y a eu une forte prise de conscience des femmes sur le sujet. Nombreuses furent cel