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Libération
Portrait

Ferry, exister à tout prix

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Philosophe brillant, Luc Ferry aime l’exposition, quitte à faire preuve de légèreté.
publié le 2 juin 2011 à 0h00

L'un de ses professeurs confie : «C'était, et de loin, le plus intelligent de sa génération.» Avant de faire l'intéressant sur Canal +, Luc Ferry, 60 ans, a eu plusieurs vies. Il a même été un jeune philosophe extrêmement brillant, excellent connaisseur de Kant et destiné à une belle carrière dans l'université. Séducteur autant que travailleur, il a rattrapé à marche forcée une enfance à la campagne, presque coupée du monde, même si ses parents lui firent apprendre le grec et le latin. De sa vie de prof, il garde, outre l'érudition, un talent incomparable de pédagogue.

Mais il en voulait plus. Son père construisait des voitures, sa mère était au foyer : lui ne se contentera pas d'être philosophe, il deviendra célèbre. Il commence à faire parler de lui en publiant en 1985, avec Alain Renaut, la Pensée 68, véritable machine de guerre contre «l'antihumanisme» qui dominait depuis deux décennies le champ intellectuel français. Bourdieu, Foucault, Lacan et Derrida s'y voyaient accusés d'avoir radicalisé les analyses des «maîtres du soupçon» (Marx, Nietzsche, Freud et Heidegger). En poussant la critique des institutions sociales jusqu'à leur destruction, ils auraient fait le lit de l'individualisme postmoderne. Une exécution sommaire, souvent approximative, mais enlevée.

«Salonard». Luc Ferry a choisi sa famille, celle des intellectuels «antitotalitaires» qui, autour de François Furet, déclarent que la gauche est morte. En 1992, il