Robert Bourgi ne dit jamais rien gratuitement. En ouvrant grand les portes de l'arrière-boutique de la Françafrique, cet avocat franco-libanais sait pertinemment qu'il vient de brûler ses vaisseaux. «Il perd sur tous les tableaux, s'inquiète l'un de ses amis. Plus aucun chef d'Etat africain ne va vouloir le recevoir et il risque une mise en examen pour son rôle dans les détournements de fonds.» Lui qui a vécu en Côte-d'Ivoire, où il a fréquenté aussi bien Félix Houphouët-Boigny que Laurent Gbagbo, pourrait faire sien ce dicton local : «Cabri mort ne craint pas le couteau.»
Humiliation. Blessé, à tout le moins, Robert Bourgi l'est profondément. De ces blessures d'amour propre qui font le plus mal. «Il est humilié, car il a été répudié», dit l'un de ses proches, en évoquant l'attitude de l'exécutif à son encontre. En tirant à vue sur Jacques Chirac et Dominique de Villepin dans le Journal du dimanche, l'avocat vise en réalité d'autres cibles. En premier lieu, le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé, qui avant de prendre la direction du Quai d'Orsay a exigé et obtenu que le sulfureux intermédiaire soit mis hors circuit. Son prédécesseur, Bernard Kouchner, s'y était essayé. En vain : Bourgi était alors protégé par le puissant secrétaire général de l'Elysée, Claude Guéant.
En mai, c'est Alain Juppé lui-même qui a biffé le nom de Robert Bourgi sur la liste des invités à la cérémonie d'investiture à Yamou