Comment approcher la vérité des élites qui nous gouvernent, dans le public comme dans le privé, au-delà des caricatures, des légendes entretenues comme des escarpins et surtout de ce vent mauvais qui les désignent chaque jour davantage à la vindicte populaire ? Critique littéraire dotée d'un subtil talent de portraitiste au Journal du dimanche, Marie-Laure Delorme a mijoté sa propre recette en mettant sur le gril un échantillon de neuf énarques fin de siècle (une seule femme), passés dans cette grande fabrique de la République entre 1985 et 1999. Ils ont des têtes bien faites, de l'ambition à revendre, un goût souvent immodéré pour le risque, et une fascination pour l'éclat de la lumière. Agés de 39 à 55 ans, ils ont vécu plusieurs vies, ont goûté tant à l'ivresse qu'au poison du pouvoir et jonglent entre les médias, la politique, les affaires, la banque et - il en reste - le service public. «Qu'on le déplore ou non, l'avenir du pays sera fait d'eux et avec eux», prévient Delorme. Il y a là Nicolas Bazire (LVMH), Sophie Boissard (SNCF), Alexandre Bompard (Fnac), Jean-François Copé (qui rêve toujours de devenir président), Martin Hirsch, Emmanuel Hoog (AFP), Denis Olivennes (Lagardère Active), Matthieu Pigasse (banque Lazard) et Laurent Solly (TF1).
L'auteure a su les amadouer, les entourer d'une apparente bienveillance pour mieux les approcher. Lors de longs entretiens, elle a traqué leurs vérités dissimulées sous de solides armures. Tous savent mettre leur