«Quand je commence quelque chose, je vais jusqu'au bout, la preuve.» Effectivement. Vendredi soir, à la veille de son élection à la présidence du Sénat, potentiellement l'acmé de sa carrière, Jean-Pierre Bel reçoit Libération deux fois. Trente minutes comme prévu, puis une heure improvisée, après deux autres rendez-vous… tout ça parce qu'au terme du premier interview, on avait soupiré que très peu avait été dit. Et le lecteur convaincu de la Dictature de l'urgence d'acquiescer, de son ton comme ontologiquement posé : «Vous avez raison, et une psychanalyse, ça ne s'interrompt pas au milieu… Si vous le pouvez, revenez un peu plus tard.» Bel a tout compris de l'approche portrait-dans-Libération, et il joue le jeu sans barguigner. On sort du Sénat avec l'impression de l'avoir saisi avant que les ors ne le corsettent. Mais aussi, avec l'idée que dans la catégorie animal politique, Bel est peut-être, vraiment, particulier.
Jean-Pierre Bel, disons-le tout net, nous était un total étranger dix jours plus tôt. Pas passé par un quelconque gouvernement, pas vu aux avant-postes du PS. Et s'il est sénateur depuis treize ans, s'il a été président de son groupe pendant sept, la corporation n'est pas si électrisante qu'on puisse avoir envie de rencontrer son éventuelle tête de pont. Mais bon, l'heure était là, historique : le premier président socialiste à la Chambre haute sous la Ve République. Champagne !
Quoique. Pas sûr que lui-même