C'est un changement d'époque, mondial et radical. Sous nos yeux, en ce moment même, s'ouvre un nouveau cycle long, celui du retour aux commandes de la puissance publique et de la politique après trente années de libéralisme triomphant durant lesquelles le dogme était que «l'Etat n'était pas la solution mais le problème» et que ce n'était pas de lui mais de la sagesse des marchés que dépendait le bien-être général.
Ce changement, on vient de le sentir en France avec la stupéfiante affluence qu’a connue, dimanche, la primaire de la gauche. Ce succès des socialistes tenait beaucoup, bien sûr, au rejet national dont Nicolas Sarkozy est victime jusque dans son camp mais, outre que ce désamour est précisément né de la fascination de cet homme pour le libéralisme, il n’y a pas qu’en France que la fronde souffle. Une élection régionale après l’autre, la droite allemande ne cesse plus de perdre pied. Le Danemark vient de repasser à gauche. La droite italienne se délite, gangrenée par cette sacralisation de la réussite financière qu’incarnait Berlusconi, et il y a maintenant les Etats-Unis.
Après avoir essaimé en Europe et rebondi en Israël, ce début de révolte morale qu'est le mouvement des «indignés», se répand d'une côte américaine à l'autre, rallie les syndicats et a suffisamment de résonance dans l'opinion pour que Barack Obama et son vice-président, Joe Biden, l'aient aussitôt légitimé en déclarant, l'un, qu'il exprimait «une suspicion largement partagée envers la man