Eric Maigret est professeur de sociologie des médias à l'université Paris-III Sorbonne Nouvelle. Pour lui, une élection ne peut pas se gagner simplement grâce aux débats télévisés, même s'ils permettent de mettre en place une «dramaturgie».
Un débat télévisé peut-il faire ou défaire une élection ?
Une élection ne se gagne jamais à l’image ni à la rhétorique pure. C’est un résultat que l’on connaît depuis des décennies, les électeurs sont très enracinés dans ce qu’ils connaissent, ils filtrent l’information qui leur est donnée en fonction de leur identité sociale, de leur âge, de leur genre… Ces débats ont plutôt, à l’arrivée, un effet de renforcement des opinions préexistantes.
On ne peut donc pas gagner une élection avec un débat ?
Non, je ne crois pas que cela se soit jamais vu. Quand on passe en revue les grands débats de ces dernières décennies, on voit bien qu’il n’y a jamais eu de coup de théâtre. Prenez celui qui a opposé John Kerry à George W. Bush en 2004. Kerry était donné comme gagnant haut la main. C’est le président sortant, George W. Bush, qui l’a emporté. Il n’y a pas de vrai vainqueur dans un débat. Sauf celui ou celle que le public plébiscite au départ.
Dans ce cas, quel est alors l’intérêt de ces débats ?
Il n’y a pas de politique sans échange incarné. Les débats servent donc à élaborer une scène, à forger une dramaturgie. Et ils font exister les candidats sur cette scène. Un débat sert à échanger des arguments rationnels mais aussi à déployer une rhétorique et une image qui permettent de faire exister un candidat.
Ces débats de la primaire sont-ils spécifiques ?
Pour une élection présidentielle, le débat de l’entre deux tours arrive après une campagne électorale d