De crises en sommets de la dernière chance, l’Union européenne semble aujourd’hui naviguer à vue, davantage orientée par les écueils à éviter que portée par le vent d’un projet. Il serait tentant d’aller chercher dans l’Histoire le dessein caché, la raison d’être de cette aventure. Pourtant, si l’histoire de l’intégration européenne nous enseigne une chose, c’est bien que l’Europe n’a souvent été que cela. Une suite de réponses apportées dans l’urgence et sous la contrainte par des leaders qui auraient préféré ne pas avoir à quitter les eaux tranquilles de l’indépendance nationale. Tant pour les transferts de souveraineté que pour les aménagements institutionnels, l’histoire de l’Europe est d’abord une histoire de crises.
Les transferts de souveraineté d’abord. Aujourd’hui, le constat sur lequel semblent s’entendre aussi bien les fédéralistes que les eurosceptiques est le suivant : nous avons mis la charrue avant les bœufs en adoptant une monnaie unique sans pouvoir budgétaire fédéral ; de ce fait, nous subissons les conséquences de la mauvaise gestion budgétaire des autres Etats membres sans pouvoir les contrôler. Mais ce refrain fait écho à celui des années 70-80 : nous avons mis la charrue avant les bœufs en créant un marché commun sans monnaie unique, disait-on ; de ce fait, nous subissons les conséquences des dévaluations et réévaluations de nos partenaires sans pouvoir les contrôler. Et le marché commun répondait lui-même à la dépendance croissante des Etats face aux po