Ex-juge d’instruction, Eric Halphen a été le premier magistrat à enquêter sur les affaires visant le RPR et Jacques Chirac. Entre 1994 et 2001, il s’est longtemps affronté à l’entourage du Président. Et c’est lui qui, en 2002, l’a convoqué comme témoin pour la première fois. Il préside aujourd’hui l’association anticorruption Anticor.
Durant des années, vous avez conduit une des principales enquêtes visant Jacques Chirac. Il vient d’être condamné dans un autre dossier. Quel est votre sentiment ?
Je réagis en tant que citoyen et je constate qu’il n’y a pas deux justices, celle des puissants et celle des autres. Ce jugement est très rassurant. Sur le fond, cette décision atteste qu’il existait bien un système frauduleux à la mairie de Paris et au RPR. Il confirme ce que les différentes instructions avaient mis en avant. Mais le plus important est peut-être que, malgré le statut pénal qui protège le Président, malgré les instructions du pouvoir et les interventions, le président français peut être jugé comme n’importe quel citoyen.
Vous vous êtes heurté à de multiples reprises au parquet, cette institution qui a fini par demander la relaxe de Jacques Chirac. Mais les juges ont infligé un désaveu cinglant au procureur de la République…
Dans mon livre, Sept Ans de solitude, j'avais développé l'idée que, au fil des instructions des dossiers politico-financiers, les représentants du parquet se transforment bien souvent en avocats de la défense. Le procès de Jacques Chirac, comme de nombreuses autres affaires, l'a confirmé. Cela montre une chose : notre justice a besoin d'indépendance et surtout pas, comme certains le souhaitent, de la suppression des juges d'instruction.
Vous vous êtes confronté violemment aux avocats de Chirac et à certains de ses conseillers. Existait-il réellement un cabinet noir à l’Elysée ?
Aujourd’hui, je peux dire qu’il existait un cabinet organisé autour de Dominique de Villepin, dont l’objectif était de faire obstacle à tous les juges qui enquêtaient sur