Qui doit gouverner ? On susciterait le rire si on s’avisait de reprendre la réponse de Platon : les philosophes. Rien n’empêche qu’un gouvernant soit philosophe, mais il n’y a aucune raison qu’un philosophe soit, plus que quiconque, voué au gouvernement des hommes. Pour Platon, est philosophe celui qui s’est sorti de la caverne fuligineuse des opinions et a atteint par la raison le monde de la connaissance.
En rayant le nom de philosophe, on pourrait donc dire : «Doit gouverner celui qui sait». La formule n’apparaît dès lors risible que si on change son signe : doit gouverner celui qui ne sait rien et est incompétent en tout. Considérant les systèmes électifs de nos démocraties, on voit qu’ils sont inaptes à mesurer le savoir ou à attester l’incompétence. On le réalise, en riant jaune, lorsqu’un député, de profession dentiste ou avocat, devient ministre des Armées ou de l’Agriculture, ou lorsque Ronald Reagan, acteur hollywoodien, se retrouve président des Etats-Unis, et Silvio Berlusconi, homme d’affaires expert en chansonnettes et histoires drôles, président du Conseil italien.
Existe-t-il un système qui permettrait de minimiser de tels risques ? Dans la Grèce antique, on recourait au tirage au sort. De prime abord, il ne semble pas que cela évite que le pouvoir soit confié à des incapables ou à des crapules, statistiquement aussi nombreux que les gens de bien. Mais les Grecs considéraient que le hasard était guidé par la sagesse des dieux et soumettaient les élus à un exame