Professeur de sciences politiques à l'université Paris-I et auteur d'un ouvrage classique de sociologie électorale, le Cens caché, Daniel Gaxie travaille depuis de longues années sur la participation.
La participation à la présidentielle de 2007 fut assez forte, s’inscrivant a contrario de la tendance longue. Comment l’expliquer ?
Il y a dans tous les pays occidentaux une tendance de longue période à la baisse de la participation électorale : il y avait 15,8% d’abstention au premier tour de la présidentielle de 1974 et 28,4% en 2002 - dans les deux cas, il faut ajouter autour de 10% de citoyens qui ne votent pas, faute d’être inscrits. La baisse de la participation ne s’explique pas par un accroissement du nombre des abstentionnistes constants, mais plutôt par une progression de l’abstention intermittente. C’est cette intermittence qui explique la forte variation des taux de participation selon les types d’élection. Tel électeur, qui vote aux deux tours de l’élection présidentielle, va s’abstenir quelques semaines plus tard, lors des élections législatives.
La tendance à la progression de l’abstention est le résultat d’un ensemble complexe de facteurs structurels et contextuels : l’affaiblissement des Etats, la progression des familles monoparentales, l’urbanisation, la précarisation, la paupérisation, les discriminations, le chômage de masse, la déconstruction de la classe ouvrière, l’affaissement du mouvement ouvrier, la montée des scepticismes politiques… Mais il y a aussi des éléments conjoncturels et des facteurs spécifiques à chaque élection qui peuvent renforcer ou contrarier la tendance au