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Libération
Interview

«La fin de la saga des lois mémorielles»

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Paul Cassia, professeur de droit à la Sorbonne, se félicite de la décision des Sages :
publié le 29 février 2012 à 0h00

Professeur à l’Ecole de droit de la Sorbonne (Paris-I), Paul Cassia a fait partie des universitaires engagés contre les lois mémorielles.

Quelle est votre réaction après la décision du Conseil constitutionnel de censurer cette loi ?

C’est une bonne décision, attendue par les juristes. Son sens ne faisait pas de doute, hormis pour les auteurs de la proposition de loi, qui avaient tenté de faire prévaloir le supposé «humanisme» dont s’inspirerait leur texte sur le respect de la Constitution.

Pourquoi une «bonne décision» ?

Elle fait respecter un principe : le Parlement n’a pas à s’ériger en tribunal. Ce n’est pas à lui de qualifier pénalement des faits, et il ne peut, au regard de la Constitution, réprimer un crime qu’il a lui-même qualifié de génocide. Le texte censuré renvoie à la loi du 29 janvier 2001 qui reconnaît le génocide arménien. Le conseil a donc aussi jugé cette loi inconstitutionnelle.

Pourquoi ne l’a-t-il pas aussi censurée ?

Il aurait pu le faire, si l’on admet que la loi censurée réprimant la négation du génocide arménien ne fait que compléter celle qui l’a reconnu en 2001.

Donc, s’il en est saisi via une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), il peut le faire…

Non. Car son inconstitutionnalité découle de ce que la loi de 2001 est exclusivement déclaratoire, sans portée normative. Ce grief ne peut pas être invoqué dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité, qui ne vise à protéger que les droits et libertés constitutionnels. La loi de 2001 reste donc dans l’ordre juridique, alors même qu’elle est inconstitutionnelle. C’est un paradoxe. Quoi qu’il en soit, en exigeant que toute loi ait un contenu normatif, le Conseil constitutionnel met sans doute fin à la saga des lois mémorielles dans le droit fra