C.H. : Dans l’objectif de privilégier la création contemporaine plutôt que le patrimoine, serait-il insensé de verser les droits d’auteur après la mort d’un artiste à des «aides à la création» plutôt qu’aux héritiers ?
A.F. : Ce serait en quelque sorte une manière de supprimer l'héritage, mais uniquement pour les créateurs, et ce serait un peu injuste si cela ne concerne qu'eux ! La durée des droits d'auteur relève d'accords internationaux sur lesquels il est impossible de revenir unilatéralement. D'ores et déjà, au bout de soixante-dix ans, les œuvres tombent dans le domaine public. Et pour financer la création, les créateurs peuvent aussi choisir de léguer une partie de leurs biens à l'institution de leur choix… De plus, une partie des droits d'auteurs sert au travail éditorial que mènent les ayant-droits. Et, dans l'intervalle, les sociétés de recouvrement des droits utilisent une part des sommes perçues pour soutenir les artistes. Cela n'empêche pas de s'interroger sur l'extension continue de leur durée qui frise parfois l'absurde - Disney a obtenu une extension de vingt ans des droits pour protéger la commercialisation de sa mascotte. Tout ceci semble bien éloigné de l'intérêt réel des créateurs et de leurs descendants directs. Sans céder sur le principe du droit d'auteur, et en particulier du droit moral, il faudra mener une réflexion afin d'éviter des situations comme celle qu'a connue François Bon avec sa nouvelle traduction, empêchée