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Libération
Reportage

La France, de gauche à droite, et en travers

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Après cinq ans au pouvoir d’une majorité «décomplexée», comment vont les Français ? Une semaine avant le scrutin, «Libération» a pris le train et parcouru le pays pour prendre son pouls. Attention au départ.
Une semaine avant le scrutin, «Libération» a pris le train et parcouru le pays pour prendre son pouls. (Photos Rodolphe Escher pour Libération)
publié le 20 avril 2012 à 21h06

Tout commence dans une salle de rédaction survoltée par la danse des courbes, qui se frôlent, se croisent, s'écartent. «De l'air !» réclame un rédacteur en chef, «Je veux savoir où en sont les Français, ce qu'ils vivent, ce qu'ils pensent dans la dernière ligne droite.» Quelqu'un trace une diagonale sur une carte, de Crozon à Menton. C'est ainsi qu'on monte dans un TGV Paris-Brest bondé, dix jours avant le premier tour. D'ici à ce fameux dimanche, au gré des TER, des Teoz ou des Corail, on aura battu la campagne. Croisé des Bretons, des Stéphanois, des routards et des Toulonnais, riches ou pas, heureux ou non, indécis ou résolus. La France «silencieuse», chère au président-candidat, ce «peuple» qui ne demande qu'à parler, et surtout à être écouté.

«Tout le monde esquive !»

A Rennes, la nuit tombe et les rangs s'éclaircissent. Des voyageurs se séparent, restent ou descendent, comme dans la Ronde, le film de Max Ophüls où chaque personnage, enchaîné à un autre, s'efface. Sur un siège, un numéro froissé du Télégramme, qui publie «La présidentielle vue de Rostrenen», bourgade au milieu des terres, 3 650 habitants et un maire qui confie : «Je ne me retrouve pas dans cette campagne.»

C'est justement ce que dit Jean-Paul, costume sombre et lunettes carrées, devant un Cocaà la voiture-bar. Il est agriculteur, né dans une ferme où l'on dormait à huit dans deux pièces, sous le grenier à foin. Quara