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Libération
Interview

«La présidente du Front national démocratise la xénophobie»

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Le sociologue Sylvain Crépon analyse la stratégie de dédiabolisation de Marine Le Pen :
publié le 22 avril 2012 à 23h56

Sylvain Crépon, sociologue et spécialiste du Front national, est chercheur à l’université Paris-Ouest-Nanterre.

Que penser du score de Marine Le Pen ?

C’est vraiment un succès pour elle, sans précédent au niveau national. Elle va plus loin que son père. Ce succès plébiscite sa stratégie. Mais c’est compliqué à analyser. D’un côté, elle a lancé une entreprise de normalisation. Elle a réussi à dire que le FN était un parti antisystème et en même temps un parti qui se voulait comme les autres, un parti qui n’était plus sulfureux. D’un autre côté, sur la fin, elle est revenue aux fondamentaux - peur de l’immigration, de l’insécurité - et son père y est allé de ses provocations… Les bonnes vieilles recettes, et ça a dû payer. Elle a joué sur les deux tableaux. Et, malgré tout, son image, un peu moins sulfureuse que celle de son père, a joué.

Qui sont ses électeurs ?

En plus des électeurs traditionnels du FN, il y a sans doute des déçus de Sarkozy et des abstentionnistes de 2007. Des jeunes aussi. Les sondages annonçaient qu’environ 25% des jeunes envisageaient de voter pour elle. Je ne serais pas étonné qu’ils aient été au rendez-vous. C’est une génération qui arrive sur le marché du travail en pleine crise économique, qui est désenchantée de la politique, qui a du mal à recevoir le discours très technocratique des candidats de gouvernement. Comme ils sont aussi très pessimistes, le discours sur la préférence nationale peut porter.

On a parlé de «républicanisation» du discours du FN.

Pour dédiaboliser son parti, Marine Le Pen a eu tendance à vouloir afficher un bon comportement républicain. Elle a