Une expression va, pendant ces quinze jours qui nous séparent du second tour, faire florès : «faire la chasse à l’électorat» du Front national. Comme si les 6 millions de Français qui ont déposé un bulletin Marine Le Pen dans l’urne dimanche n’étaient que du gibier dont la chasse ne serait autorisée que pendant deux semaines tous les cinq ans. La logique du scrutin à deux tours impose évidemment aux deux finalistes de s’adresser aux électeurs de leurs concurrents du premier tour, ceux du FN comme les autres. La question n’est donc pas de parler à cet électorat - autant dire qu’il faut changer le peuple - mais comment François Hollande et Nicolas Sarkozy choisiront de le faire.
Le président sortant a, pendant sa campagne de premier tour, fait le choix de l'amalgame : inquiétudes justifiées et angoisses fantasmées, préoccupations compréhensibles et discours indéfendables ont été mis dans le même shaker… au plus grand profit de Marine Le Pen. La force du FN et la faiblesse du vote centriste obligent Nicolas Sarkozy à poursuivre dans cette voie détestable. Elle a tout d'une impasse. François Hollande, dans l'entretien qu'il nous a accordé, confie qu'il entend continuer de parler à la gauche, tout en s'adressant sans perdre son âme aux électeurs en «souffrance» de Marine Le Pen. Mais pour le candidat du PS, puisqu'il reste le favori, le vrai rendez-vous commencera après le 6 mai. Il n'aura pas trop d'un quinquennat pour ramener ces électeurs dans les bras de la République