Professeur de littérature française à l’université Paris-VIII-Vincennes-Saint-Denis, Denis Bertrand (photo DR) estime que le comportement inattendu du candidat socialiste a déstabilisé Nicolas Sarkozy.
La forme du débat d'entre-deux tours entre Nicolas Sarkozy et François Hollande vous a-t-elle surpris ?
En terme de discours, cela a été un événement assez fort. Compte tenu de la situation électorale, je m'étais dit, après le premier, que ça allait être la quinzaine de la rhétorique au sens noble du terme. Il n'est en effet pas simple de choisir le chemin de crête des mots, des paroles et des arguments pour attraper par le discours des électeurs des deux extrêmes en même temps, ainsi que les abstentionnistes du premier tour. Il y avait un enjeu de créativité dans le discours, et il y a eu un petit événement rhétorique qui est presque diffusé partout dans le grand public, c'est l'anaphore.
La déjà fameuse série des «Moi, président de la République, je...»...
Moi qui fais beaucoup d'analyse des discours d'un point de vue sémiotique, en m'interdisant l'utilisation de tout jargon, quand j'ai entendu ce matin à la radio la définition de l'anaphore et de l'épiphore, je me suis dit que Hollande avait fait très fort. Cette série de 15 anaphores d'affilée, dans une forme de déclinaison un peu shakespearienne, c'était une audace extraordinaire dans le discours. D'autant qu'il n'a pas loupé sa chute alors qu'il est très dur de sortir de ce genre de figure. Ce morceau a été particulièrement réussi et a résonné comme un événement dans le débat.
Avez-vous noté l'usage d'une autre figure rhétorique significative ?
François Hollande est apparu beaucoup plus offensif qu'on l'attendait. J'ai trouvé très intéressant son recours à la te