Elle traverse la grande salle de la cour d'appel d'un pas décidé et ancre ses deux pieds bien à plat devant le président. Elle a apporté quelques notes, qu'elle pose sur le pupitre, mais ne s'en servira pas une seule fois pendant son témoignage. Lyne Cohen-Solal connaît les faits par cœur. L'affaire des faux électeurs du Ve arrondissement de la capitale, qui a été jugée en appel à Paris du 12 au 21 novembre, c'est l'histoire de la vie politique de cette candidate PS à la mairie, toujours malheureuse face à Jean Tiberi. «Je me suis présentée pour la première fois dans le Ve lors des législatives en 1997, débute-t-elle d'une voix ferme. Je faisais partie du "quota femmes", on nous mettait à l'époque dans des endroits imprenables pour le parti. J'avais donc beaucoup de motivation, mais peu d'espoirs.» Lyne Cohen-Solal comprend très vite que le combat électoral est, en plus, biaisé. «On envoyait des tracts, beaucoup nous revenaient faute d'habitants aux adresses indiquées», se souvient-elle. Sa défaite annoncée se produit. Puis, plus inattendu, l'article du Canard enchaîné d'avril 1997 qui lance toute l'affaire des faux électeurs.
M. Shakespeare, domicilié rue Saint-Jacques
Lyne Cohen-Solal épluche alors les listes électorales et tombe sur un nom qui l’intrigue, M. Shakespeare, résidant au 373, rue Saint-Jacques. Or la rue s’arrête, côté impair, au numéro 307. Onze électeurs - des faux, donc - y sont pourtant domiciliés. Dix sont employés par la Ville de Paris, dont