Le pari de Pierre Joxe était risqué. Le mercredi 31 octobre, il avait fait adopter par le Conseil des ministres son projet de loi «portant statut de la collectivité territoriale de Corse». L'article premier, qui garantissait «à la communauté historique et culturelle vivante que constitue le peuple corse la préservation de son identité culturelle et la défense de ses intérêts économiques et sociaux», devait être le sésame qui ouvrirait la voie vers la paix civile. A l'Assemblée nationale, il était parvenu de justesse à faire voter son texte.
L'assassinat, le 19 décembre, de Lucien Tirroloni, président de la chambre régionale d'agriculture corse, a sonné le glas des ambitions pacificatrices du ministre de l'Intérieur. «La Corse, longtemps endeuillée par les crimes de sang et les destructions criminelles, avait, depuis plus de deux ans, pris l'habitude de voir la paix civile se rétablir. L'espoir renaissait. La volonté de dialoguer dans la démocratie et le respect mutuel permettait de tracer des perspectives pour l'avenir», déclarait alors, amer et désabusé, Pierre Joxe.
Les coups de feu qui ont abattu lundi soir Paul Mariani prennent l’allure d’un coup de grâce porté à un statut qui, après avoir suscité bien des espoirs, avait finalement réalisé contre lui un paradoxal consensus. L’annonce brutale - et on ne plus concise, faite hier par l’Elysée de la tenue, jeudi, d’un Conseil des ministres restreint consacré aux problèmes corses - peut dès lors appar