Toute sa vie, Maurice Herzog a voulu être un héros. Et il s'est sans doute éteint en le voulant encore, arrivé dans les brumes du grand âge. Dès l'annonce de son décès vendredi à Neuilly, le mot «légende» a tourné en boucle sur les ondes, tandis qu'une photo mythique se répandait de clic en clic : anorak bleu nuit et bonnet blanc assortis au ciel et à la neige, Maurice Herzog brandit un drapeau bleu-blanc-rouge accroché à son piolet.
Il est 14 heures au sommet de l'Annapurna, ce 3 juin 1950, et Maurice Herzog, ivre de sa conquête, reste près d'une heure dans la bourrasque glaciale. Il a encore ses doigts, qu'il perdra dans la descente. «Victoire sur l'Himalaya», titrera bientôt Paris-Match à sa une : «Pour la première fois, un drapeau flotte sur un sommet de plus de 8 000 mètres et c'est un drapeau français.» La nation a retrouvé ses couleurs.
Cordée. Cette année-là a commencé de façon morose. Cinq ans après la guerre, les soldats tombent en Indochine, comme les gouvernements de la IVe République. Certains rêvent de prendre de la hauteur, dont le patron de la Fédération française de la montagne, qui lance une ambitieuse expédition au sommet du monde. Ce sera l'Annapurna, avec en tête de la cordée un ancien chasseur alpin.
Bon alpiniste, Maurice Herzog, 31 ans, n’est pas le plus aguerri de cette expédition qui compte les meilleurs guides alpins, Lionel Terray, Gaston Rébuffat et surtout Louis Lachenal. Mais c’est le plus méd