Où est passé l’Esprit à gauche ? Aurait-il été assassiné ? Mais par qui ? Les agapes familiales et amicales de cette fin d’année 2012 pourraient donner lieu à des Cluedo politiques. A travers ses reculades («la compétitivité» à la place de la réforme fiscale, le droit de vote des étrangers aux élections locales, Florange…), ses atermoiements (mariage homosexuel…) et ses troubles de la morale («affaire Cahuzac»), les repères intellectuels de la gauche hollandaise apparaissent pour le moins flous. Et ceux de ses critiques de gauche ne se présentent guère comme une alternative stimulante. Or, la définition même de la gauche en France a été historiquement liée au travail intellectuel et à la création culturelle.
Certes, on trouve encore des idées à gauche, mais souvent dans un fatras peu réfléchi, empilées sous la forme d’habitudes, d’automatismes, d’évidences… Du côté de la gauche de gouvernement, les idées ont subi le massacre à la tronçonneuse technocratique : le découpage de la réalité en rondelles «techniques» sur lesquelles se penchent des «experts». Les rapports remis par des énarques ont ainsi largement remplacé les connaissances, les œuvres et les concepts ciselés par les chercheurs, les écrivains et les artistes. La mise à distance des préjugés rendue possible par les pensées critiques et les sciences sociales a été marginalisée. L’émiettement des problèmes, le nez dans le guidon, s’est substitué à l’effort de globalisation. L’accentuation du processus de professionnali