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TRIBUNE

Ce populisme liquide qui se propage à tout l’échiquier politique

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par Raphaël Liogier, Professeur des universités, IEP d’Aix-en-Provence, directeur de l’Observatoire du religieux-Cherpa, responsable du master religions et société
publié le 13 octobre 2013 à 18h06

Le populiste n'est pas un démagogue ordinaire qui tente de séduire le plus grand nombre d'électeurs, mais il est possédé, presque au sens mystique, par la vérité incritiquable du peuple, par sa bouche s'exprime le bon sens populaire qu'aucun argument rationnel ne peut contredire. Le populisme est fondé sur l'émotion, et il ne fonctionne que lorsqu'une société connaît une rupture de récit collectif, autrement dit lorsqu'elle ne réussit plus à se raconter positivement. C'est une telle rupture de récit qui touche à mon sens les sociétés européennes, et pas seulement la France, depuis le début des années 2000. La plupart des sondages laissent apparaître ce sentiment de déclin mêlé au rejet de la mondialisation, autrement dit du monde tel qu'il est. Le populiste par son discours radicalement antisystème, sans programme clairement défini, ni de droite ni de gauche, capte, se nourrit et alimente cette angoisse collective. Mais la mondialisation est trop impersonnelle, il lui faut personnaliser la peur, désigner des cibles concrètes à sa portée. Ce que l'on appelle des boucs émissaires. Par exemple, le musulman qui est un des boucs émissaires les plus pratiques, parce qu'il synthétise tout à la fois l'image du Sarrazin ennemi multiséculaire de l'Europe chrétienne et l'antimodernité, permettant ainsi l'alliance émotionnelle entre les réactionnaires et les progressistes, en vue de défendre la collectivité contre une force envahissante (qui partout nous encercle) et maléfique (qui a l'