Il reçoit toujours au local CFDT. Seul. Le drapeau orange vif du syndicat accroché sur le mur bleu ciel domine la pièce. Au-dessus : des photos de la «lutte» des sidérurgistes d'ArcelorMittal de Florange pour empêcher la fermeture des derniers hauts fourneaux français. Pendant qu'il prépare le café, on chambre Edouard Martin sur son costume marron, sa chemise blanche et ses chaussures qui contrastent avec le blouson orange qu'il portait sur les piquets de grève et devant les caméras. La «marque» de son entrée en politique ? «Ah non ! Vous n'allez pas vous y mettre vous aussi ?» répond la nouvelle tête de liste du Parti socialiste aux européennes dans le Grand-Est. «J'ai une émission télé ce soir et je ne repasse pas chez moi entre-temps… Vous croyez quoi ? Qu'on fait nos courses en bleu de travail !» Le ton est direct. Sans agressivité.
Depuis le 17 décembre, Edouard Martin, 50 ans, a changé de rôle. Il n'est plus le gentil leader syndical français en lutte contre le méchant milliardaire indien Lakshmi Mittal, que les médias aimaient adorer. Mais le «traître», celui qui «va à la soupe», manger dans «la main de ses bourreaux». Celui qui avait accusé François Hollande et Jean-Marc Ayrault de «trahison», face caméra et les larmes aux yeux, le jour de leur refus de nationaliser Florange, se voit accusé de «tomber dans la récupération» socialiste. «Je savais que ça allait secouer, mais je ne m'attendais pa