Philosophe et vice-président de la Fondation Nicolas-Hulot, Dominique Bourg vient de composer avec Augustin Fragnière une riche anthologie de la Pensée écologique.
Comment s’articulent pensée écologique et écologie politique ?
Mal. Il faudrait plutôt parler d’absence d’articulation. Ce sont deux continents, l’un théorique, l’autre pratique et militant, reliés par quelques rares passeurs. J’y vois plusieurs raisons. D’abord, qu’il s’agisse d’éthique environnementale ou de justice globale et climatique, une profonde domination anglo-saxonne. Même si commence d’émerger en France une nouvelle génération de penseurs, leurs travaux ne semblent pas encore grandement intéresser les élus verts. Une autre raison tient sans doute au fait que, au lieu de prendre la forme d’une critique de l’anthropocentrisme, la pensée d’écologie politique française a surtout été une critique sociale de l’aliénation - avec des gens comme André Gorz, Cornelius Castoriadis ou Félix Guattari. La nature et les diagnostics scientifiques n’avaient presque pas droit de cité. Et puis, en France, l’écologie s’est longtemps tenue en marge des élites. Gallimard, par exemple, a mis du temps avant de publier des livres d’écologie, le Seuil l’a fait au début des années 70 puis s’est arrêté un long moment.
A l’inverse, les penseurs de l’écologie ont-ils réfléchi à la question du débouché politique de leurs idées ?
La question de la création d’un parti a été posée en France. Quelqu’un comme Bernard Charbonneau, un des pionniers avec Jacques Ellul de la veine française, était opposé à l’idée d’un parti écologiste, il pensait que cela marginaliserait la cause. Et j’ai l’impression